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Caramel au beurre salé

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17 juillet 2009

The Devil's Advocate (M. West)

Résumé
Faire d’un homme un saint… Il ne peut y avoir de plus grande transformation. C’est, par définition, au-delà de l’ambition humaine. Le procès est long, lent et méticuleux. Tout doit être passé au crible, rien ne doit rester caché au regard perçant et imperturbable de l’Eglise.
C’est pourquoi Monseigneur Blaise Meredith est officiellement nommé Avocat du Diable par le Vatican, et chargé de trouver une raison, n’importe laquelle, pour que le procès de Giacomo Nerone ne soit pas mis en branle.
Sans pitié, sans faiblesse, la vérité sur la vie entière d’un homme est révélée. Mais pour Blaise Meredith, cela allait être la plus terrible et la plus éprouvante des enquêtes…

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C’est conseillée par mon père que je me suis lancée dans Morris West, un des rares grands auteurs qui savent parler de religion avec finesse, humilité et sans le clinquant si populaire de la superstition et des mystères. Avec L’Avocat du diable, on a entre les mains une mine d'informations sur l’enquête et les recherches qui mènent à canoniser un « Servant of God ». Mais par-delà ce thème, c’est aussi un trésor de réflexion sur la foi, à travers les personnalités qui emplissent le livre – peu nombreuses mais extrêmement différentes les unes des autres, de la jeune femme à la confiance simple et inébranlable, au peintre torturé, calculateur, mais non sans noblesse.
On aurait pu craindre une morale chrétienne rigide et sous-jacente, stigmatisant les péchés des hommes, la jalousie meurtrière des uns, les amours contre-nature des autres, mais Morris West étonne le lecteur avec un dénouement inattendu et un accent finalement mis non sur la culpabilité ou la triste repentance, mais sur l’Amour et ses miracles.

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7 avril 2009

The Brooklyn Follies (P. Auster)

Résumé
Nathan Glass, la soixantaine, s’installe à Brooklyn avec un cancer en rémission. Par hasard, il y retrouve son neveu, Tom Wood, ex-chauffeur de taxi et maintenant employé d’une librairie, qui avait pourtant été promis à une brillante carrière universitaire. Entre discussions sur de vieux souvenirs, et découvertes d’autres personnalités – comme le curieux Harry Brightman, patron de Tom, ou la B.P.M. (Beautiful Perfect Mother) dont Tom est follement amoureux – la vie s’écoule lentement. Jusqu’à ce qu’une autre petite silhouette apparaisse dans leur vie, annonciatrice de bien des bouleversements…

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Pour être honnête, j’ai eu du mal à me plonger dans ce roman, à m’y accrocher immédiatement. Pour une part, parce que lorsque je lis en anglais, les mots trouvent moins d’écho dans mon esprit, et je suis moins transportée. Mais si je n’ai pas été conquise, dès les premières pages, par ce magnifique roman, c’est aussi parce que j’y cherchais une histoire, un fil directeur… sans vouloir comprendre que ce fil était sous mes yeux, l’histoire de Nathan Glass, de sa vie à Brooklyn et de ses fabuleuses rencontres.

Plusieurs choses m’ont vraiment conquise dans l’écriture de Paul Auster (pour ce qui est de Brooklyn Follies en tout cas). La narration d'abord, qui change de rythme, de « manière » comme lorsque le narrateur décide de retranscrire un dialogue brut, sans fioritures, un vrai dialogue de théâtre parce que, selon lui, seuls les mots étaient importants à ce moment-là. 
D’ailleurs, le narrateur est toujours à portée de notre oreille, prêt à dire, au détour d’une phrase, « là je vais couper », « là il faudra imaginer par vous-même.» C’est déroutant, mais original et plaisant.
Ces destins qu’il nous raconte, ce sont eux les véritables « folies de Brooklyn », ces destins qui sont inimaginables et pourtant enviables par certains côtés. Chaque personnage est travaillé au ciseau avec une précision que l’on ne se lasse pas d’admirer : on s’attache peu à peu à ce Tom qui nous paraissait trop mou, au très étrange Harry, à la petite Lucy et bien sûr à Nathan, l’incontournable narrateur. Tous finissent par prendre, au fil des pages, des couleurs que l’on ne soupçonnait pas avant. L’histoire est parfois drôle, parfois sordide, mais toujours touchante.
Terminer l’histoire de ces folies humaines par la mention du 11 septembre 2001 est le coup de maître. Surtout lorsqu’en trois phrases, Paul Auster nous fait sentir l'immense fossé séparant l’optimisme de ce Monsieur-tout-le-monde à la tête pleine de projets et la folie de notre monde.

Voilà qui - j'espère - vous donnera envie de le découvrir !

26 septembre 2008

6 choses...

J’ai été taguée il y a quelques temps déjà (par un certain martlet, du fabuleux blog martlet), alors je rattrape mon retard…
Le but était de donner 6 choses totalement inintéressantes sur moi, alors allons-y dans la joie et la bonne humeur !

1) j’adore le bleu. C’est quelque chose que l’on remarque immédiatement sur moi (même si ce blog fait exception) ; et au contraire, il faut batailler ferme pour me faire mettre du rose !

2) j’ai horreur du téléphone. J’aime bien discuter avec les gens mais, trouvant qu’un sourire ou une mimique exprime beaucoup de choses, je considère que les silences passent beaucoup mieux quand on a son interlocuteur en face plutôt qu’au bout d’une ligne…

3) j’ai un tic qui est de me tapoter le bout du nez quand je réfléchis à quelque chose d’insignifiant (si c’est important, je me ronge les ongles comme tout un chacun…) et ça fait rire beaucoup de monde.

4) j’adore les fleurs même si la réciproque ne semble pas vraie (j’en ai vu dépérir au bout d’une vingtaine d’heures dans ma chambre… si, si !)

5) j’aurais voulu être médecin, mais la peur du sang et des blessures barbares m’en a très vite dissuadée… Du coup, je serai bibliothécaire, c’est moins effrayant (quoique, et là je m’adresse aux Pratchettiens, ce n’est pas si sûr que cela si on a lu Sourcellerie et la scène mythique d’appendisectomie…)

6) je déteste faire les magasins de vêtements, a fortiori toute seule. C’est vraiment un endroit où je ne me sens pas du tout à ma place.

Voilà, après ces inanités, je passe le relais à Tortoise et c’est tout (j’aime bien jouer ma rebelle de temps en temps)

16 août 2008

La Ligne de Fuite (Dabitch_Flao)

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Rimbaud est parti. Il a fui Paris, il a fui Verlaine, il a fui les poètes, et la poésie elle-même, pour s'en aller ailleurs, pour vivre... ou plutôt mourir. Combattre l'ennui, en sachant qu'il n'y parviendrait pas. Il l'écrit lui-même : « Je m'ennuie beaucoup, toujours ; je n'ai même jamais connu personne qui s'ennuyât autant que moi. » Et cette phrase, qui ouvre l'album, donne immédiatement le ton au lecteur.
1888. Depuis quelques temps déjà, personne n'a plus de nouvelles de Rimbaud. L'équipe du journal "le Décadent", sous la houlette d'Anatole Baju, décide de publier un "faux" inédit du grand poète, à la fois hommage et provocation. Adrien, l'auteur du sonnet, n'y voit qu'un hommage au poète qui le hante, mais cette publication - pourtant pas la première - fait scandale. Démasqué et décrié par le tout-Paris, Adrien ne se fait pas trop prier pour partir à la recherche de son modèle. Quête qui va le conduire de Paris jusqu'en Afrique, en passant par Charleville et Marseille...

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J'aime beaucoup la façon dont ils ont mis Verlaine en scène... Son discours sur cette page m'a beaucoup émue. (cliquez pour voir en plus grand)

Lorsqu'on se plonge dans La Ligne de fuite, on comprend vite qu'on est en présence de l'un de ces rares albums qui vous marquent longtemps... pour peu qu'on aime la poésie. Ponctué de poèmes et de lettres insérés avec talent dans l'histoire, le voyage initiatique d'Adrien nous absorbe peu à peu. Grâce à une narration mêlant rêve et réalité, Christophe Dabitch signe ici un bel hommage au poète ; et le dessinateur Benjamin Flao n'est pas en reste : par des aquarelles magnifiques et un trait original, il réussit à mêler l'onirisme qu'évoque immédiatement le nom de Rimbaud, et le réalisme que celui-ci a choisit de suivre en arrêtant la poésie au crépuscule de sa courte vie.

Une très belle BD pour les amateurs du genre et de poésie...

16 août 2008

Petits suicides entre amis (A. Paasilinna)


Résumé

« SONGEZ-VOUS AU SUICIDE ?
Pas de panique, vous n'êtes pas seul.
Nous sommes plusieurs à partager les mêmes idées, et même un début d'expérience. Ecrivez-nous en exposant brièvement votre situation, peut-être pourrons-nous vous aider. Joignez vos nom et adresse, nous vous contacterons. Toutes les informations recuillies seront considérées comme strictement confidentielles et ne seront communiquées à aucun tiers. Pas sérieux s'abstenir. Veuillez adresser vos réponses Poste restante, Bureau central de Helsinki, nom de code "Essayons ensemble". »

Deux suicidaires se retrouvent fortuitement dans une vieille grange où ils souhaitent partir tranquilles. Entravés dans leurs funestes projets, ils se mettent en tête de rassembler d'autres désespérés pour monter une association. Commence alors, à bord d'un car de tourisme flambant neuf, un périple loufoque mené à un train d'enfer, des falaises de l'océan Arctique jusqu'au cap Saint-Vincent au Portugal pour un saut de l'ange final.

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Avis
Après avoir lu La Douce empoisonneuse, je n'ai pas pu résister en voyant ce petit livre (presque 300 p. quand même) me tendre les bras dans une librairie. Pour être honnête, je l'ai trouvé moins drôle que le précédent... Mais il y a quand même de nombreux passages savoureux ! J'avais peur que tourner en ridicule une pratique qui malheureusement existe (le suicide collectif) soit de très mauvais goût mais je crois que c'était le défi de Paasilinna et il l'a relevé avec beaucoup de talent. Les personnages sont tous très hauts en couleurs, les situations complètement rocambolesques, et tout cela est agrémenté de petites touches d'humour... Bref, je vous recommande du Paasilinna, ça vaut le détour ! 

Extraits :
"Le plus grave dans la vie c'est la mort, mais ce n'est quand même pas si grave" (Maxime populaire)

Les suicidaires passèrent trois jours à Rönteikkösalmi. Dans la journée, ils éclaircissaient les rangs de betteraves et se régalaient de purée de pommes de terre et de saucisses Stroganoff mitonnées par Kati Jääskeläinen. Le soir, ils faisaient cercle autour du feu de camp et bavardaient entre eux, à des fins thérapeutiques.
Ils appréciaient cette saine vie rustique et seraient bienr estés plus longtemps à la ferme, mais Urho n'avait pas d'autres travaux de binage à leur proposer.
Au moment du départ, l'agriculteur, qui avait appris le but du voyage des suicidaires et s'était lié d'amitié avec eux, déclara avec regret :
"J'irai ben aussi m'tuer dans l'Nord... mais nous aut'paysans, on a ben trop à faire, en été. J'ai point l'temps d'voyager. Mais pourquoi qu'vous prendriez pas la patronne ? La Kati, elle a qu'ça à faire... ça m'dérangerait point, qu'elle fasse un peu de tourisme."
Le colonel refusa la proposition d'Urho Jääskeläinen. Son épouse, selon lui, ne semblait guère suicidaire et serait donc forcément comme une pièce rapportée dans cette expédition nordique. Il ne pouvait pas non plus lui garantir de voyage de retour.
"Ben tant pis alors... c'était histoire de dire, hein",  fit le fermier déçu.

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9 juin 2008

Expiation (I. McEwan)

Titre original : Atonement (2001)

Résumé (qui dévoile un peu l'intrigue...) :
Dans une Angleterre d'entre-deux guerres, la jeune Briony (13 ans) veut être écrivain. Elle prépare d'ailleurs, en cet été 1935, une pièce de théâtre destinée à être jouée par ses cousins pour l'arrivée de son frère, Leon. Mais dans la même journée, elle surprend une scène entre sa soeur, Cecilia, et le fils du jardinier, Robbie, près de la fontaine, scène que son regard d'enfant ne peut analyser correctement, et que son esprit d'écrivain, fantaisiste, modèle à sa propre idée. C'est cependant cette scène anecdotique et ce qu'elle en comprend qui vont précipiter la vie de ces trois êtres dans le tourment. A la suite d'un drame (le viol de la jeune cousine), Briony désignera Robbie comme coupable, et ce dernier sera arrêté sur ce seul témoignage. A partir de là, et avec comme toile de fond la guerre, chacun des trois personnages vivra ses propres tourments : pour Robbie, ce sera les horreurs de la guerre et la survie pour retrouver Cecilia qui lui a dit "Reviens, je t'attendrai". Pour Cecilia, ce sera l'attente. Et pour Briony, ce sera l'expiation, comprendre que mêler fiction et réalité peut être dangereux, et tenter de se faire pardonner, mais n'est-il pas trop tard ?

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Un très beau roman, qui se lit d'une traite, une fois passée l'originalité du style et de la construction. Il est, en effet, peut-être difficile d'apprécier la première partie, qui peut sembler longue car elle se déroule dans le cadre d'une unique journée, mais vécue par chacun des personnages principaux. C'est la journée qui va faire basculer leur vie, alors ça ne m'a pas gêné, mais certains n'apprécient pas... La seconde partie est plus "vivante", plus intense, et aussi agréable à lire. Et l'épilogue est magnifique, mais là je n'en dirai pas plus pour ne rien gâcher !

Un film est sorti récemment sous le titre de "Reviens-moi" (de J. Wright, avec K. Knightley, J. McAvoy, S. Ronan)

7 mars 2008

Madame Bovary (G. Flaubert)

Un petit extrait d'un classique que je ne me lasse pas de relire.

La mort de Madame Bovary

La chambre, quand ils entrèrent, était toute pleine d'une solennité lugubre. Il y avait sur la table à ouvrage, recouverte d'une serviette blanche, cinq ou six petites boules de coton dans un plat d'argent, près d'un gros crucifix, entre deux chandeliers qui brûlaient. Emma, le menton contre sa poitrine, ouvrit démesurément les paupières ; et ses pauvres mains se traînaient sur les draps, avec ce geste hideux et doux des agonisants qui semblent vouloir déjà se recouvrir du suaire. Pâle comme une statue, et les yeux rouges comme des charbons, Charles, sans pleurer, se tenait en face d'elle, au pied du lit, tandis que le prêtre, appuyé sur un genou, marmottait des paroles basses.

Elle tourna sa figure lentement, et parut saisie de joie à voir tout à coup l'étole violette, sans doute retrouvant au milieu d'un apaisement extraordinaire la volupté perdue de ses premiers élancements mystiques, avec des visions de béatitude éternelle qui commençaient.

Le prêtre se releva pour prendre le crucifix ; alors elle allongea le cou comme quelqu'un qui a soif, et, collant ses lèvres sur le corps de l'Homme-Dieu, elle y déposa de toute sa force expirante le plus grand baiser d'amour qu'elle eût jamais donné. Ensuite, il récita le Misereatur et l'Indulgentiam, trempa son pouce droit dans l'huile et commença les onctions : d'abord sur les yeux, qui avaient tant convoité toutes les somptuosités terrestres; puis sur les narines, friandes de brises tièdes et de senteurs amoureuses ; puis sur la bouche, qui s'était ouverte pour le mensonge, qui avait gémi d'orgueil et crié dans la luxure ; puis sur les mains, qui se délectaient aux contacts suaves, et enfin sur la plante des pieds, si rapides autrefois quand elle courait à l'assouvissance de ses désirs, et qui maintenant ne marcheraient plus.

Le curé s'essuya les doigts, jeta dans le feu les brins de coton trempés d'huile, et revint s'asseoir près de la moribonde pour lui dire qu'elle devait à présent joindre ses souffrances à celles de Jésus-Christ et s'abandonner à la miséricorde divine.

En finissant ses exhortations, il essaya de lui mettre dans la main un cierge bénit, symbole des gloires célestes dont elle allait tout à l'heure être environnée. Emma, trop faible, ne put fermer les doigts, et le cierge, sans M. Bournisien, serait tombé à terre.

Cependant elle n'était plus aussi pâle, et son visage avait une expression de sérénité, comme si le sacrement l'eut guérie.

Le prêtre ne manqua point d'en faire l'observation ; il expliqua même à Bovary que le Seigneur, quelquefois, prolongeait l'existence des personnes lorsqu'il le jugeait convenable pour leur salut ; et Charles se rappela un jour où, ainsi près de mourir, elle avait reçu la communion.

- Il ne fallait peut-être pas se désespérer, pensa-t-il.

En effet, elle regarda tout autour d'elle, lentement, comme quelqu'un qui se réveille d'un songe ; puis, d'une voix distincte, elle demanda son miroir, et elle resta penchée dessus quelque temps, jusqu'au moment où de grosses larmes lui découlèrent des yeux. Alors elle se renversa la tête en poussant un soupir et retomba sur l'oreiller.

Sa poitrine aussitôt se mit à haleter rapidement. La langue tout entière lui sortit hors de la bouche ; ses yeux, en roulant, pâlissaient comme deux globes de lampe qui s'éteignent, à la croire déjà morte, sans l'effrayante accélération de ses côtes, secouées par un souffle furieux comme si l'âme eût fait des bonds pour se détacher. Félicité s'agenouilla devant le crucifix, et le pharmacien lui-même fléchit un peu les jarrets, tandis que M. Canivet regardait vaguement sur la place. Bournisien s'était remis en prière, la figure inclinée contre le bord de la couche, avec sa longue soutane noire qui traînait derrière lui dans l'appartement. Charles était de l'autre côté, à genoux, les bras étendus vers Emma. Il avait pris ses mains et il les serrait, tressaillant à chaque battement de son coeur, comme au contrecoup d'une ruine qui tombe. A mesure que le râle devenait plus fort, l'ecclésiastique précipitait ses oraisons ; elles se mêlaient aux sanglots étouffés de Bovary, et quelquefois tout semblait disparaître dans le sourd murmure des syllabes latines, qui tintaient comme un glas de cloche.

Tout à coup, on entendit sur le trottoir un bruit de gros sabots, avec le frôlement d'un bâton ; et une voix s'éleva, une voix rauque, qui chantait :

Souvent la chaleur d'un beau jour

fait rêver fillette à l'amour.

Emma se releva comme un cadavre que l'on galvanise, les cheveux dénoués, la prunelle fixe, béante.

Pour amasser diligemment

Les épis que la faux moissonne

Ma Nanette va s'inclinant

Vers le sillon qui nous les donne.

- L'Aveugle ! s'écria-t-elle.

Et Emma se mit à rire, d'un rire atroce, frénétique, désespéré, croyant voir la face hideuse du misérable, qui se dressait dans les ténèbres éternelles comme un épouvantement.

Il souffla bien fort ce jour-là

Et le jupon court s'envola

Une convulsion la rabattit sur le matelas. Tous s'approchèrent. Elle n'existait plus.

2 février 2008

La douce empoisonneuse (A. Paasilinna)

Résumé

Une maisonnette rouge flanquée d’un petit sauna en bois gris, non loin d’Helsinki. Linnea, la douce veuve du colonel Ravaska, mène une existence paisible à soigner ses violettes et son chat. Pourtant chaque mois, le jour où elle touche sa pension, un trio maudit, conduit par son neveu, s’invite sous son toit pour la détrousser. Lorsque ses visiteurs ne se contentent plus de sa maigre retraite et exigent un testament à leur avantage, c’en est trop. Elle est résolue à en finir. Comprenez : à se suicider. Mais, surprise, concocter un poison mortel se révèle une activité beaucoup plus passionnante que tricoter. Et les noirs desseins de Linnea, par une suite précipitée d’évènements cocasses, se retournent en sa faveur, tandis que ses ennemis…

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Avis

Une vieille dame très digne et tranquille, candidate au suicide... Il suffit de lire la quatrième de couverture pour se laisser tenter. Très drôle, très bien écrit (ou plutôt traduit, je ne lis pas encore le finnois). Une lecture agréable et rapide qui laisse le sourire aux lèvres et donne envie de lire du Paasilinna, apparemment génie du comique de situation - ce qui ne surprend pas. Une réserve à émettre cependant : tout le monde n'apprécie pas son humour, un peu noir et un peu grinçant...

1 février 2008

Berceuse Assassine (Tome_Meyer)

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1 – Le cœur de Telenko

2 – Les jambes de Martha

3 – La mémoire de Dillon

La Berceuse Assassine c’est d’abord l’histoire de Joe Telenko, chauffeur de taxi new-yorkais, un brin de tachycardie, qui hait sa femme parce qu’elle est devenu hargneuse et dépendante depuis qu’il l’a rendue paraplégique à la suite d’un accident de voiture.

Puis c’est l’histoire de Martha, en fauteuil roulant, qui ne marche pas parce qu’elle ne le veut pas vraiment, qui hait son mari, responsable de ses malheurs et qui reste victime de sa rancœur.

C’est l’histoire de ces deux âmes qui cherchent à tuer l’autre pour se libérer, qui ne se séparent pas parce que chacun rêve de voir crever l’Autre…

Et pour clôturer ce triptyque glauque, c’est l’histoire de Dillon, un indien Navajo dont la vie a basculé lorsqu’un couple de blancs a renversé sa petite fille Hope dans un accident de voiture, restant pourtant impunis…

Au fil des tomes, ces trois vies s’entremêlent dans une danse macabre, au rythme d’un cœur, d’un tour de roue, d’une berceuse, chacun exposant les raisons qui poussent un être à l’assassinat, chacun expliquant son calvaire et sa décision… que le lecteur se surprend à légitimer à chaque tome. 

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Du point de vue esthétique, rien à dire sinon son admiration. Meyer – le dessinateur – a su rendre à la perfection l’atmosphère pesante et sordide de cette histoire. Il joue sur les couleurs, ocres, sombres, comme pour souligner la noirceur que ces âmes charrient, au milieu de cette jungle urbaine. Pour finir sur une explosion de couleurs à la dernière planche.

Le scénariste de génie n’est nul autre que Tome, que l’on connaît aussi - dans un style tout à fait différent - pour les aventures du Petit Spirou, mais qui là revient plutôt du côté de Soda, dans ses albums plus sombres.

En résumé, un triptyque magnifique. A ne pas rater.

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(couverture de l'édition intégrale, que je trouve assez symbolique)

24 janvier 2008

Là où vont nos pères (Shaun Tan)

A l'occasion du festival d'Angoulême, je dépoussière ce blog pour présenter quelques BD qui m'ont laissé un souvenir impérissable et que je n'ai de cesse de recommander à tous ceux que la bande dessinée intéresse, au-delà du bon vieux Spirou et autres Astérix...

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Là où vont nos pères n'est pas une bande dessinée ordinaire, ce n'est même pas, à mon sens, un roman graphique (car existe-t-il un roman sans paroles ?) ; c'est une oeuvre silencieuse qui raconte cette histoire que l'on a tous entendus un jour et qui est, comme nous le montre Shaun Tan, atemporelle : l'histoire de ces hommes et femmes qui quittent leur vie pour partir en rêvant d'ailleurs mais surtout de mieux.

Ces thèmes de l'immigration, de l'étrangeté d'un monde nouveau et de sa découverte, sont traités avec un onirisme et une douceur transmis par les tons sépias et le graphisme particulier du dessin ; la composition même des planches étonne, tantôt pleines pages époustouflantes, tantôt petites cases multipliées comme autant de carreaux d'une fenêtre ouverte sur ce nouveau monde.

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Au fil de la lecture, on devine ce qui est tu : la solitude, le barrage de la langue, l'adaptation difficile... Dans ce monde imaginaire, universel, on se surprend à apprécier le silence qui nous entoure, on ressent plus qu'on ne lit. Alors, s'il faut peut-être faire un effort pour se plonger dans cet épais volume afin de le savourer à sa juste valeur, on ne le regrettera certainement pas.

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